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Page:Œuvres complètes de Condillac, tome 5 - Traité des animaux, 1803.djvu/16

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le sort des choses de mode ; la nouveauté leur donne la vogue, le temps les plonge dans l’oubli ; on diroit que leur ancienneté est la mesure du degré de crédibilité qu’on leur donne.

C’est la faute des philosophes. Quels que soient les caprices du public, la vérité bien présentée y mettroit des bornes ; et si elle l’avoit une fois subjugué, elle le subjugueroit encore toutes les fois qu’elle se présenteroit à lui.

Sans doute nous sommes bien loin de ce siècle éclairé, qui pouroit garantir d’erreur toute la postérité. Vraisemblablement nous n’y [432] arriverons jamais ; nous en aprocherons toujours d’âge en âge, mais il fuira toujours devant nous. Le temps est comme une vaste carriere qui s’ouvre aux philosophes. Les vérités semées de distance en distance sont confondues dans une infinité d’erreurs qui remplissent tout l’espace. Les siecles s’écoulent, les erreurs s’acumulent, le plus grand nombre des vérités échape, et les athletes se disputent des prix que distribue un spectateur aveugle.