— C’est votre faute aussi, madame, reprit-il avec adresse, vous ne voulez pas nous finir l’histoire de la femme au fou.
— Ah ! c’est vrai, la chasse nous faisait oublier la femme au fou !
— Eh bien, je vous disais que madame de Pontanges avait élevé Laurence comme sa fille, qu’elle l’avait comblée de tendresse, et que par reconnaissance Laurence avait consenti à épouser son fils.
— Eh bien, qu’est-ce qu’il y a de romanesque là-dedans ?
— Ma femme a oublié de vous dire, reprit M. d’Auray, que le fils de madame de Pontanges est fou.
— Vous le flattez… il est imbécile ! s’écria madame d’Auray impatientée d’avoir manqué son histoire. C’est un véritable crétin ; il a vingt-cinq ans passés et il ne dit encore que maman.
Tout le monde se mit à rire à ces mots. Lionel seul s’écria :
— Pauvre jeune femme, si belle !
III.
UNE VISITE.
— Est-ce aujourd’hui que nous allons à Pontanges ? dit le lendemain madame d’Auray ; le château est superbe, admirablement bien conservé : c’est tout le moyen âge ; le pont-levis, les tourelles, rien n’y manque.
— Pas même le fou, dit l’homme d’argent, heureux de lire et fier d’une érudition tardive.
— C’est à deux lieues d’ici ; il fait beau, nous partirons à trois heures, si vous voulez.
— Il pleuvra dans la journée…
— Non, la grenouille est au beau temps.
— Ne parlez pas de votre grenouille, elle n’indique que le temps qu’il fait, dit Lionel : c’est le temps qu’il fera que je veux savoir.
— Jeune homme, le présent n’est rien pour toi, c’est l’avenir seul qui t’inquiète ! s’écria le héros de l’Empire, —