moyen de lui rendre service, et bientôt il s’établit à la campagne chez lui, après l’avoir présenté chez madame de Pontanges, afin que l’assiduité de ses visites parût moins extraordinaire.
Leur intimité n’était plus alors qu’un voisinage insignifiant.
Un soir que l’ami n’avait pu venir, ce qui arrivait souvent, on apporta les lettres et les journaux.
Comme madame de Pontanges décachetait une petite lettre parfumée dont l’écriture lui était inconnue :
— De qui est cette lettre ? demanda M. de Marny.
— Je ne sais pas encore… voyez la signature.
— Pourquoi rougissez-vous ?… Vous n’oseriez pas me donner ce billet à lire avant vous, je parie ?
— Moi ! si vraiment… le voilà.
Lionel prit le billet.
« Merci, ma chère cousine, de votre aimable intérêt, il m’a porté bonheur ; du jour où j’ai reçu votre lettre, j’ai été guéri. Cependant ma sœur veut que je me soigne encore ; elle m’emmène à Champigny, où l’on m’ordonne de passer deux mois.
» Deux mois près de vous, quel avenir !
Lionel, en lisant ces mots, devint pâle ; son visage se contracta de colère. Ce billet pour lui était un cartel.
Laurence se sentait troublée ; elle n’avait pas écouté la lecture de ce billet sans émotion.
— Ah ! vous lui avez écrit, dit Lionel avec amertume.
— Je le devais : M. de Loïsberg est mon cousin germain.
— Belle raison pour se jeter à sa tête !…
Laurence ne répondit pas ; elle leva sur Lionel un regard plein de dignité, et se rapprochant de la table de piquet, elle parut s’intéresser vivement au jeu de sa tante.
Madame Ermangard avait beau jeu.
— Je laisse une carte, dit-elle ; qu’en penses-tu ?
— Je ferais comme vous, ma tante, répondit Laurence.
— Vous savez jouer au piquet ? demanda M. de Marny.
— Oui, monsieur.