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Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 2.djvu/317

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DE PONTANGES.

quand ils sont devenus indispensables à notre vie, quand on ne peut plus se passer d’eux, alors ils se fâchent ; ils feignent de se décourager ; dans leur menteur désespoir ils s’éloignent… bien confiants, mon Dieu ! car ils savent qu’on les rappellera… hélas ! à tout prix.

Laurence ne répondit pas ; pourtant son émotion était profonde.

C’était la première fois qu’on lui parlait d’aimer.

Ce langage si tendre enivrait son cœur.

Et Lionel parlait si bien cette langue ; il était si aimable quand il voulait plaire ! Sans être convaincu, il savait déjà persuader. Qu’était-ce donc lorsqu’il disait vrai, lorsque sa voix, son regard, son âme, étaient en harmonie avec ses paroles !

C’était un charme irrésistible.

— Oui, vous m’aimez ! s’écria Laurence avec passion, je le sens !…

Et lui leva les yeux au ciel pour toute réponse.

— Je suis heureuse, dit-elle. Et elle essuya ses larmes.

— Laurence !… s’écria Lionel en lui saisissant la main.

Monsieur le prince de Loïsberg !


dit un valet de chambre, annonçant une visite.

« Que le diable l’emporte ! » pensa Lionel.

Et il se leva pour saluer le prince.

— C’est vous, mon cousin… vous êtes bien aimable, dit madame de Pontanges avec embarras ; mais quelle imprudence de venir sitôt !

— C’est une indiscrétion peut-être… dit le prince avec amertume. Puis se reprenant : — Car vous ne m’aviez pas invité, ajouta-t-il.

— Vous serez toujours le bienvenu à Pontanges, mon cousin. Mais asseyez-vous donc ; je crains que vous ne soyez fatigué.

M. de Loïsberg prit un fauteuil.

— Je devais venir de meilleure heure, dit-il ; mais il est