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Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 3.djvu/183

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OU DEUX AMOURS

Robert contemplait ce trouble avec des yeux pleins de joie et d’amour. Lui aussi était pâle, lui aussi était oppressé par une émotion puissante ; mais il pouvait regarder Marguerite, et en la voyant vaincue, il était heureux. Il se rapprocha d’elle, et d’une voix affaiblie et voilée par la tendresse, il dit :

— Ah ! Marguerite, est-ce là un adieu ?

Elle aurait voulu répondre : « Non, c’est un engagement… c’est ma vie que je vous ai donnée, prenez-la, je vous appartiens !… » Mais elle ne pouvait parler, et, sans, force, succombant à cette oppression brûlante qui suspendait sa vie, éperdue, enivrée, mourante, elle se laissa tomber dans ses bras.

— Enfin !… s’écria Robert.

Madame d’Arzac entra. Marguerite, à sa vue, n’éprouva ni confusion ni crainte ; avec une audace inconnue que lui donnait la foi de son amour, elle alla vers elle et lui montrant M. de la Fresnaye :

— Ma mère, dit-elle, je vous présente mon mari.



XXI.

— Son mari !… lui ! s’écria madame d’Arzac. Elle jeta sur Robert un regard indigné… et elle sortit en fermant la porte avec violence. On l’entendit encore répéter plusieurs fois en s’en allant : « La pauvre femme, elle est folle ! elle est folle ! » Marguerite, un moment attristée, se remit bientôt, et s’approchant de Robert :

— Elle vous aimera, lui dit-elle pour le consoler de cette injure… Mais Étienne va venir !… mon Dieu !

— Il ne faut pas qu’il vous retrouve ici, répondit Robert, venez vite… Appelez Gaston.

— Où irai-je ?

— Nous verrons, mais partons tout de suite ; dépêchez-vous, je vais donner vos ordres.

Il parlait déjà en maître.

Marguerite alla s’habiller pour sortir et chercher Gaston.