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LE VICOMTE DE LAUNAY.

et caressée. Nous avons passé en revue toute la gent adulatrice, et dans ces ricochets de flatterie nous ne trouvons pas une seule flatterie pour la royauté. Où donc sont les flatteurs du roi ? Les poëtes ? — Demandez à l’auteur des Enfants d’Édouard si ce drame était un hommage à la royauté de Juillet. Les peintres ? — Regardez les portraits officiels, et dites-nous si le roi est flatté. Les orateurs ? — Écoutez ces belles harangues de la Chambre qui disent toutes à la couronne avec plus ou moins d’éloquence : « Cachez-vous donc, l’on vous voit. » Oui, nous le prouvons, en France tout le monde a des flatteurs, excepté le roi, à moins cependant que vous ne considériez comme des flatteurs ses assassins qui le traitent en Henri IV ?

Mais soyons de bonne foi, pourquoi le flatterait-on ? On n’encense que le pouvoir, et qu’est-ce qu’un roi constitutionnel a de commun avec le pouvoir ? Il a, dites-vous, le droit de déclarer la guerre ; soit, c’est fort bien ; mais il ne peut faire la guerre sans argent ; et comme c’est vous seuls qui pouvez lui en donner, il faut qu’il vous demande la permission de vouloir faire la guerre.

N’importe ! le droit de déclarer la guerre n’en est pas moins une des prérogatives de la royauté, et l’une des belles vérités de la charte.

Le roi nomme les ministres, bien. Mais si les ministres qu’il nomme constitutionnellement ne plaisent pas à la Chambre, elle les destitue constitutionnellement, et elle prie alors très-respectueusement le roi de choisir ceux qu’elle lui impose ; c’est un droit qu’elle lui reconnaît et que jusqu’à présent on n’a pas encore songé à lui contester ; c’est aussi une des belles prérogatives de la royauté, une des meilleures vérités de la charte.

Le roi a le droit de faire grâce, c’est-à-dire qu’il peut chaque année rendre à la société, dont ils faisaient le plus bel ornement, deux ou trois forçats, et faire d’un parricide quelque peu sensible et délicat un galérien à perpétuité. Encore ce droit sublime lui est-il disputé souvent avec cruauté ; nous l’avons vu naguère après un affreux attentat : le roi n’a jamais pu obtenir de M. Thiers la grâce d’Alibaud.