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LA JOIE FAIT PEUR.
Un petit salon. — Au fond, une porte à deux battants ouvrant sur le théâtre ; de chaque côté de la porte, un canapé. À droite, dans l’angle, une fenêtre à balcon avec de grands rideaux. Au premier plan, une cheminée ; une table servant à dessiner est près de la fenêtre ; un fauteuil sur le devant de la scène. À gauche, au premier plan, une table à tiroir adossée au mur ; dans l’angle, une porte. Sur le devant de la scène, une chaise longue faisant face à la cheminée ; un pouff est devant la chaise longue.
Scène I.
MADAME DES AUBIERS, BLANCHE, OCTAVE, MATHILDE.
(Madame des Aubiers est assise sur la chaise longue ; Blanche est près d’elle, assise sur le pouff, faisant face au public ; toutes deux travaillent au même morceau de guipure ; Octave, assis sur le canapé du fond, à droite, tient un livre, mais il ne lit pas, il regarde Mathilde avec inquiétude ; celle-ci, assise devant une table, près de la fenêtre, dessine. Les trois femmes sont en deuil. — Un silence… Jeu muet. — Madame des Aubiers, rêveuse, laisse tomber son ouvrage ; elle reste immobile et des larmes coulent de ses yeux. Blanche la regarde tristement, elle se lève, essuie les larmes de sa mère, l’embrasse, puis elle va près d’Octave qui se lève.)
Blanche.
Quel temps affreux cette nuit !… Et tous nos pauvres pêcheurs, partis depuis hier matin !…
Octave.
Ils sont rentrés dans le port… Je les ai vus, j’étais sur la jetée.
Mathilde à elle-même regardant à l’horizon.
Autrefois, au bruit de la tempête, je frissonnais, je pensais à lui et je tremblais !… Aujourd’hui, que m’importent les dangers et la tempête ?…
Madame des Aubiers à elle-même.
Hélas ! plus même d’inquiétude !…
Octave.
Le vent était si violent, qu’il a brisé le grand mât devant la cabane de la Gervaise, votre voisine.