Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/172

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Mais, par une seconde lettre, il m’apprend qu’il a encore un autre but qui, selon lui, exigerait de la part de la Ligue un appui effectif, et, pour tout dire, pécuniaire. Je me suis empressé de répondre à M. Fonteyraud que je ne pouvais pas vous entretenir d’un projet que je ne connais que très-imparfaitement. Je ne lui ai pas laissé ignorer d’ailleurs que, selon moi, toute action exercée sur l’opinion publique, en France, et qui paraîtrait dirigée par le doigt et l’or de l’Angleterre, irait contre son but, en renforçant des préventions enracinées et que beaucoup d’habiles gens ont intérêt à exploiter. Si donc M. Fonteyraud exécute son voyage, veuillez, ainsi que MM. Bright et Wilson, juger par vous-même de ses projets et me considérer comme totalement étranger aux entreprises qu’il médite. Je me hâte de quitter ce sujet, pour répondre à votre si affectueuse lettre du 23 septembre.

J’apprends avec peine que votre santé se ressent de vos immenses travaux tant privés que publics. On ne saurait, certes, la compromettre dans une plus belle cause ; chacune de vos souffrances vous rappellera de nobles actions ; mais c’est là une triste consolation, et je n’oserais pas la présenter à tout autre qu’à vous ; car, pour la comprendre, il faut avoir votre abnégation, votre dévouement au bien public. Mais enfin votre œuvre touche à son terme, les ouvriers ne manquent plus autour de vous, et j’espère que vous allez enfin chercher des forces au sein du repos.

Depuis ma dernière lettre, un mouvement que je n’espérais pas s’est manifesté dans la presse française. Tous les journaux de Paris et un grand nombre des journaux de province ont rendu compte, à l’occasion de mon livre, de l’agitation contre les lois-céréales. Ils n’en ont pas, il est vrai, saisi toute la portée ; mais enfin l’opinion publique est éveillée. C’était le point essentiel, celui auquel j’aspirais de toute mon âme ; il s’agit maintenant de ne pas la laisser