Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/194

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et des plus éminents, ont exigé que cette formalité précédât toute manifestation au dehors. Nous avons donc fait notre demande et, depuis ce jour, nous voilà à la discrétion des ministres. Ils promettent bien d’autoriser, mais ils ne s’exécutent pas. Notre ami, M. Anisson-Dupéron, déploie dans cette circonstance un zèle qui l’honore. Il a toute la vigueur d’un jeune homme et toute la maturité d’un pair de France. Grâce à lui, j’espère que nous réussirons. Si le ministre s’obstine à nous enrayer, notre association se dissoudra. Tous les peureux s’en iront ; mais il restera toujours un certain nombre d’associés plus résolus, et nous nous constituerons sur d’autres bases. Qui sait si à la longue ce triage ne nous profitera pas ?

J’avoue que je renoncerai à regret à de beaux noms propres. C’est nécessaire en France, puisque les lois et les habitudes nous empêchent de rien faire avec et par le peuple. Nous ne pouvons guère agir que dans la classe éclairée ; et dès lors les hommes qui ont une réputation faite sont d’excellents auxiliaires. Mais enfin, mieux vaut se passer d’eux que de ne pas agir du tout.

Il paraît que les protectionnistes préparent en Angleterre une défense désespérée. Si vous aviez un moment, je vous serais bien obligé de me faire part de votre avis sur l’issue de la lutte. M. Duffour assistera à ce grand combat. J’envie cette bonne fortune.

Mugron, 25 juin 1846.

Ce n’est point à vous de vous excuser, mon cher Monsieur, mais à moi ; car vous faites un grand et noble usage de votre temps, et moi, qui gaspille le mien, je n’aurais pas dû rester si longtemps sans vous écrire. Vous voilà au terme de vos travaux. L’heure du triomphe a sonné pour vous. Vous pouvez vous rendre le témoignage que vous aurez laissé sur cette terre une profonde empreinte de votre