Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/220

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pays m’ont vivement intéressé. J’ai reçu la précieuse collection[1] que vous avez eu la bonté de m’envoyer. Hélas ! quand pourrai-je seulement y jeter les yeux ! Du moins, je la tiendrai à la disposition de tous mes amis, afin que, d’une manière ou d’une autre, vos généreuses intentions ne soient pas sans résultat.

Vous voulez bien vous préoccuper de ma santé. Je suis presque toujours enrhumé ; et s’il en est ainsi en juillet, que sera-ce en décembre ? Mais ce qui m’occupe le plus, c’est l’état de mon cerveau. Je ne sais ce que sont devenues les idées qu’il me fournissait autrefois en trop grande abondance. Maintenant, je cours après et ne puis pas les rattraper. Cela m’alarme. — Je sens, mon cher ami, que j’aurais dû rester tout à fait en dehors de l’association et conserver la liberté de mes allures, écrire et parler à mon heure et à ma guise. — Au lieu de cela, je suis enchaîné de la manière la plus indissoluble, par le domicile, par le journal, par les finances, par l’administration, etc., etc. ; et le pis est que cela est irrémédiable, attendu que tous mes collègues sont occupés et ne peuvent guère s’occuper de nos affaires que pendant la durée de nos rares réunions.

Mon ami, l’ignorance et l’indifférence dans ce pays, en matière d’économie politique, dépassent tout ce que j’aurais pu me figurer. Ce n’est pas une raison pour se décourager, au contraire, c’en est une pour nous donner le sentiment de l’utilité, de l’urgence même de nos efforts. Mais je comprends aujourd’hui une chose : c’est que la liberté commerciale est un résultat trop éloigné pour nous. Heureux si nous pouvons déblayer la route de quelques obstacles. — Le plus grand n’est pas le parti protectionniste, mais le socialisme avec ses nombreuses ramifications. — S’il n’y avait que les monopoleurs, ils ne résisteraient pas à la discussion.

  1. Les cinquante volumes de la collection Custodi : Economisti classici italiani. (Note de l’éditeur.)