Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/272

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cet effort d’analogie. En Amérique, il y a des mastodontes dans toutes les carrières ; il suffit d’ouvrir les yeux. J’avais donc tout à gagner, ou plutôt la cause avait tout à gagner à ce que j’invoquasse le témoignage d’un économiste américain.

En terminant, je ne puis m’empêcher de faire observer à M. Carey qu’un Français ne peut guère lui rendre justice, sans un grand effort d’impartialité ; et comme je suis Français, j’étais loin de m’attendre à ce qu’il daignât s’occuper de moi et de mon livre. M. Carey professe pour la France et les Français le mépris le plus profond et une haine qui va jusqu’au délire. Il a déversé ces sentiments dans un bon tiers de ses volumineux écrits ; et il s’est donné la peine de réunir, sans aucun discernement, il est vrai, de nombreux documents statistiques, pour prouver que c’est à peine si, dans l’échelle de l’humanité, nous sommes au-dessus des Indous. À la vérité, M. Carey, dans son livre, nie cette haine. Mais, en la niant, il la prouve ; car comment expliquer un tel déni ? qui l’a provoqué ? C’est la conscience même de M. Carey, qui, surpris lui-même, sans doute, de toutes les preuves de haine contre la France qu’il a accumulées dans son livre, a cru devoir proclamer qu’il ne haïssait pas la France. Combien de fois n’ai-je pas dit à M. Guillaumin : Il y a d’excellentes choses dans les ouvrages de M. Carey, et il serait bien de les faire traduire ; ils contribueraient à faire avancer l’économie politique dans notre pays. Mais aussitôt j’étais forcé d’ajouter : Pouvons-nous jeter dans le public français de pareilles diatribes contre la France, et ne risquons-nous pas de manquer notre but ? Le public ne repoussera-t-il pas ce qu’il y a de bon dans ces livres, à cause de ce qu’il y a de blessant et d’injuste ?

Qu’il me soit permis de finir par une réflexion sur le mot plagiat, dont je me suis servi au début de cette lettre. Les personnes auxquelles je puis avoir emprunté un aperçu ou