Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/406

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« Vous dites que je soumets ma politique à la politique anglaise ; mais voyez mes actes.

Il était juste de rendre aux Français le droit d’échanger confisqué par quelques privilégiés ; j’ai voulu entrer dans cette voie par des traités de commerce. Mais on a crié : À la trahison ! et j’ai rompu les négociations.

S’il faut que les Français achètent au dehors des fils et tissus de lin, je pensais qu’il valait mieux pour eux en obtenir plus que moins, pour un prix donné. Mais on a crié : À la trahison ! et j’ai établi des droits différentiels.

Il était de l’intérêt de notre jeune colonie africaine d’être pourvue, à bas prix, de toutes choses, afin de croître et prospérer. Mais on a crié : À la trahison ! et j’ai livré l’Algérie au monopole. »

« L’Espagne aspirait à secouer le joug d’une de ses provinces ; c’était son intérêt, c’était le nôtre, mais c’était aussi celui des Anglais. On a crié : À la trahison ! et pour étouffer ce cri importun, j’ai maintenu ce que l’Angleterre voulait renverser, à savoir l’exploitation de l’Espagne par la Catalogne. »

Voilà donc où nous en sommes. La machine de guerre de tous les partis, c’est la haine de l’étranger. À gauche, à droite, on s’en sert pour battre en brèche le ministère ; au centre, on fait pis, on la traduit en actes pour faire preuve d’indépendance, et le monopole arrive à toutes ses fins avec ce seul mot : À la trahison !

Où tout cela nous mènera-t-il ? je l’ignore. Mais je crois que ce jeu des partis recèle des dangers, et je m’explique pourquoi le général Cubière demandait que l’armée fût portée à 500 000 hommes ; pourquoi l’opinion alarmée réclame une puissante marine ; pourquoi la France fortifie la capitale et paye 1 milliard et demi d’impôts.

§ II. — Pendant que ces choses se passent en France, examinons les tendances de l’économie politique anglaise,