Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/202

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En effet, si la condition individuelle des citoyens était stationnaire, le revenu des taxes indirectes augmenterait exactement comme la population. Si, en outre, le capital national, et avec lui le bien-être général, vont croissant, le revenu doit augmenter plus vite que le nombre des hommes. Enfin, si les facultés de consommation sont rétrogrades, le Trésor doit en souffrir. Il suit de là que lorsqu’on a sous les yeux ce double phénomène : accroissement de population, diminution de recettes, on a une double raison pour conclure que le peuple est soumis à des privations progressives. Élever dans ce moment le prix des choses, c’est soumettre les citoyens à des privations additionnelles, sans aucun avantage fiscal.

Or, quel était, à ce point de vue, l’état des choses en 1840 ?

Il était constaté que la population augmentait de 360 361 habitants par année.

D’après cela, en supposant les ressources individuelles seulement stationnaires, quel aurait dû être le produit de la douane et de l’accise, et quel fut-il en réalité ? C’est ce qu’on verra dans le tableau suivant :


ANNÉES. POPULATION. PRODUIT PROPORTIONNEL
des taxes indirectes.
PRODUIT RÉEL.
1836 26 158 524 36 392 472 l. s. 30 392 472 l. s.
1837 26 518 885 36 938 363 33 958 421
1838 26 879 246 37 484 254 34 478 417
1839 27 239 607 38 030 145 35 093 633
1840 27 599 968 38 567 036 [1] 35 536 469

Ainsi, même en l’absence de tout progrès industriel, et par la force seule du nombre, le revenu, qui avait été de 36 millions en 1836, aurait dû être de 38 millions en 1840. Il tomba à 35 millions, malgré la surtaxe de 5 pour 100, résultat que l’affaiblissement des années précédentes aurait dû faire prévoir. Ce qu’il y a de singulier, c’est que dans les

  1. Avec la surtaxe de 5 pour 100 votée cette année.