Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/391

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blique une pleine confiance dans l’honnêteté et la droiture de leur politique. La fameuse coalition de M. Fox avec lord North, qu’il avait si souvent dépeint comme quelque chose de pis qu’un démon incarné, fit reculer de plus d’un demi-siècle la cause de la réforme en Angleterre, et permit à notre oligarchie de nous plonger dans une guerre contre la France, dont les conséquences pèseront encore sur bien des générations futures. Dans le débat auquel donna lieu le traité de commerce avec la France, en février 1787, on vit M. Fox plaider formellement l’exclusion des produits français de nos marchés, se fondant sur ce que les Français étaient « nos ennemis naturels, » et qu’il fallait par conséquent éviter tout rapprochement commercial ou politique entre les deux nations. En se faisant, dans des vues spéciales et temporaires, le héraut de ce vieux préjugé, M. Fox rendit d’avance complétement inefficaces tous les efforts qu’il devait faire plus tard pour empêcher la guerre contre la France. De même, l’adoption temporaire de la bannière de la protection par les chefs des Whigs dans la question des sucres, les eût forcés, le jour où ils seraient arrivés aux affaires, à se mettre en état d’hostilité contre la liberté du commerce. — La récente coalition de lord John Russell avec lord Ashley, dont, pendant qu’il était au pouvoir, il avait traité les propositions de toute la hauteur de son mépris[1], est un autre exemple du danger de subordonner les principes au triomphe réel ou imaginaire d’une manœuvre de parti ; et s’il rentre au pouvoir, il s’apercevra qu’il s’est préparé une série d’embarras auxquels il ne pourra échapper qu’aux dépens de sa dignité. — Pour ne parler que du cabinet actuel, chacun sait que les plus grandes difficultés que rencontre l’administration de sir R. Peel proviennent des encouragements pleins de partialité qu’il donna aux démonstrations de lord Sandon, des calomnies prodiguées au clergé d’Irlande, des appels faits aux préjugés nationaux contre le peuple irlandais, et de l’acquiescement plus qu’im-

  1. On sait que la motion de lord Ashley consiste à limiter à dix heures le travail des manufactures, et que sir Robert Peel, qui s’y oppose, en fait une question de cabinet.