Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/26

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par la chasse, la pêche, la culture, le filage, le tissage, l’architecture, et il est clair qu’il vaudrait mieux pour lui que ces obstacles n’existassent qu’à un moindre degré ou même n’existassent pas du tout. En société, il ne s’attaque pas personnellement à chacun de ces obstacles, mais d’autres le font pour lui ; et, en retour, il éloigne un des obstacles dont ses semblables sont entourés.

Il est clair encore qu’en considérant les choses en masse, il vaudrait mieux, pour l’ensemble des hommes ou pour la société, que les obstacles fussent aussi faibles et aussi peu nombreux que possible.

Mais si l’on scrute les phénomènes sociaux dans leurs détails, et les sentiments des hommes selon que l’échange les a modifiés, on aperçoit bientôt comment ils sont arrivés à confondre les besoins avec la richesse et l’obstacle avec la cause.

La séparation des occupations, résultat de la faculté d’échanger, fait que chaque homme, au lieu de lutter pour son propre compte avec tous les obstacles qui l’environnent, n’en combat qu’un ; le combat non pour lui, mais au profit de ses semblables, qui, à leur tour, lui rendent le même service.

Or, il résulte de là que cet homme voit la cause immédiate de sa richesse dans cet obstacle qu’il fait profession de combattre pour le compte d’autrui. Plus cet obstacle est grand, sérieux, vivement senti, et plus, pour l’avoir vaincu, ses semblables sont disposés à le rémunérer, c’est-à-dire à lever en sa faveur les obstacles qui le gênent.

Un médecin, par exemple, ne s’occupe pas de faire cuire son pain, de fabriquer ses instruments, de tisser ou de confectionner ses habits. D’autres le font pour lui, et, en retour, il combat les maladies qui affligent ses clients. Plus ces maladies sont nombreuses, intenses, réitérées, plus on consent, plus on est forcé même à travailler pour son utilité person-