Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/382

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gine ? Pourquoi n’admet-il pas qu’obéissant à leur propre initiative les hommes se tourneront d’eux-mêmes vers le commerce sur des rivages étendus et commodes, sans qu’un Lycurgue, un Solon, un Rousseau s’en mêlent, au risque de se tromper ?

Quoi qu’il en soit, on comprend la terrible responsabilité que Rousseau fait peser sur les inventeurs, instituteurs, conducteurs, législateurs et manipulateurs de Sociétés. Aussi est-il, à leur égard, très exigeant.

« Celui qui ose entreprendre d’instituer un peuple doit se sentir en état de changer, pour ainsi dire, la nature humaine, de transformer chaque individu qui, par lui-même, est un tout parfait et solitaire, en partie d’un plus grand tout, dont cet individu reçoive, en tout ou en partie, sa vie et son être ; d’altérer la constitution de l’homme pour la renforcer, de substituer une existence partielle et morale à l’existence physique et indépendante que nous avons tous reçue de la nature. Il faut, en un mot, qu’il ôte à l’homme ses propres forces pour lui en donner qui lui soient étrangères… »

Pauvre espèce humaine, que feraient de ta dignité les adeptes de Rousseau ?

Raynal. « Le climat, c’est-à-dire le ciel et le sol, est la première règle du législateur. Ses ressources lui dictent ses devoirs. C’est d’abord sa position locale qu’il doit consulter. Une peuplade jetée sur les côtes maritimes aura des lois relatives à la navigation… Si la colonie est portée dans les terres, un législateur doit prévoir et leur genre et leur degré de fécondité… »

« C’est surtout dans la distribution de la propriété qu’éclatera la sagesse de la législation. En général, et dans tous les pays du monde, quand on fonde une colonie, il faut donner des terres à tous les hommes, c’est-à-dire à chacun une étendue suffisante pour l’entretien d’une famille… »

« Dans une île sauvage qu’on peuplerait d’enfants, on n’aurait qu’à laisser éclore les germes de la vérité dans les développements de la raison… Mais quand on établit un peuple déjà vieux dans un pays nouveau, l’habileté consiste à ne lui laisser que les opinions et les habitudes nuisibles dont on ne peut le guérir et le corriger. Veut-on empêcher qu’elles ne se transmettent, on veillera sur la seconde génération par une éducation