Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/61

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dustrie. — Mais ces taxes, nous avons à les payer malgré la protection. Si donc une industrie se présente et dit : « Je participe au paiement des taxes ; cela élève le prix de revient de mes produits, et je demande qu’un droit protecteur en élève aussi le prix vénal », que demande-t-elle autre chose, si ce n’est de se décharger de la taxe sur le reste de la communauté ? Sa prétention est de recouvrer, par l’élévation du prix de ses produits, le montant de sa part de taxes. Or, le total des impôts devant toujours rentrer au Trésor, et la masse ayant à supporter cette élévation de prix, elle paie sa taxe et celle de cette industrie. Mais, dites-vous, on protégera tout le monde. — D’abord cela est impossible ; et, cela fût-il possible, où serait le soulagement ? Je paierai pour vous, vous paierez pour moi ; mais il ne faudra pas moins que la taxe se paie.

Ainsi, vous êtes dupes d’une illusion. Vous voulez payer des taxes pour avoir une armée, une marine, un culte, une université, des juges, des routes, etc., et ensuite vous voulez affranchir de sa part de taxes d’abord une industrie, puis une seconde, puis une troisième, toujours en en répartissant le fardeau sur la masse. Mais vous ne faites rien que créer des complications interminables, sans autre résultat que ces complications elles-mêmes. Prouvez-moi que l’élévation du prix due à la protection retombe sur l’étranger, et je pourrai voir dans votre argument quelque chose de spécieux. Mais s’il est vrai que le public français payait la taxe avant la loi et qu’après la loi il paie à la fois et la protection et la taxe, en vérité, je ne puis voir ce qu’il y gagne.

Mais je vais bien plus loin : je dis que, plus nos impôts sont lourds, plus nous devons nous empresser d’ouvrir nos ports et nos frontières à l’étranger moins grevé que nous. Et pourquoi ? Pour lui repasser une plus grande partie de notre fardeau. N’est-ce point un axiome incontestable en économie politique, que les impôts, à la longue, retombent