Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/90

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que lui, et M. Say ne se le dissimule pas ! Écoutons-le : « On a dit, à l’appui des vieilles erreurs, qu’il faut bien qu’il y ait quelque fondement à des idées si généralement adoptées par toutes les nations. Ne doit-on pas se défier d’observations et de raisonnements qui renversent ce qui a été tenu pour constant jusqu’à ce jour, ce qui a été tenu pour certain par tant de personnages que rendaient recommandables leurs lumières et leurs intentions ? Cet argument, je l’avoue, est digne de faire une profonde impression, et pourrait jeter du doute sur les points les plus incontestables, si l’on n’avait vu tour à tour les opinions les plus fausses, et que maintenant on reconnaît généralement pour telles, reçues et professées par tout le monde pendant une longue suite de siècles. Il n’y a pas encore bien longtemps que toutes les nations, depuis la plus grossière jusqu’à la plus éclairée, et que tous les hommes, depuis le portefaix jusqu’au philosophe le plus savant, admettaient quatre éléments. Personne n’eût songé à contester cette doctrine, qui pourtant est fausse : tellement qu’aujourd’hui il n’y a pas d’aide-naturaliste qui ne se décriât s’il regardait la terre, l’eau et le feu comme des éléments. »

Sur quoi M. Ferrier fait cette observation :

« Si M. Say croit répondre ainsi à l’objection très-forte qu’il s’est proposée, il s’abuse étrangement. Que des hommes, d’ailleurs très-éclairés, se soient trompés pendant plusieurs siècles sur un point quelconque d’histoire naturelle, cela se comprend et ne prouve rien. L’eau, l’air, la terre et le feu, éléments ou non, en étaient-ils moins utiles à l’homme ?… Ces erreurs-là sont sans conséquence ; elles n’amènent pas de bouleversements, ne jettent pas de malaise dans les esprits, elles ne blessent surtout aucun intérêt, raison pour laquelle elles pourraient, sans inconvénient, durer des milliers d’années. Le monde physique marche