Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/607

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notre intelligence finie de comprendre et de concilier les infinis. Plaçant à l’entrée de la science sociale cette sentence : Dieu ne peut vouloir le mal, elles arrivent à cette série de conclusions : « Il y a du mal dans la société, donc elle n’est pas organisée selon les desseins de Dieu. Changeons, changeons encore, changeons toujours cette organisation ; essayons, expérimentons jusqu’à ce que nous ayons trouvé une forme qui efface de ce monde toute trace de souffrance. À ce signe, nous reconnaîtrons que le règne de Dieu est arrivé. »

Ce n’est pas tout. Ces écoles sont entraînées à exclure de leurs plans sociaux la liberté au même titre que la souffrance, car la liberté implique la possibilité de l’erreur, et par conséquent la possibilité du mal. « Laissez-nous vous organiser, disent-elles aux hommes, ne vous en mêlez pas ; ne comparez, ne jugez, ne décidez rien par vous-mêmes et pour vous-mêmes ; nous avons en horreur le laissez faire, mais nous demandons que vous vous laissiez faire et que vous nous laissiez faire. Si nous vous conduisons au bonheur parfait, l’infinie bonté de Dieu sera justifiée. »

Contradiction, inconséquence, orgueil, on ne sait ce qui domine dans un tel langage.

Une secte, entre autres, fort peu philosophique, mais très-bruyante, promet à l’humanité un bonheur sans mélange. Qu’on lui livre le gouvernement de l’humanité, et, par la vertu de quelques formules, elle se fait fort d’en bannir toute sensation pénible.

Que si vous n’accordez pas une foi aveugle à ses promesses, soulevant aussitôt ce redoutable et insoluble problème, qui fait depuis le commencement du monde le désespoir de la philosophie, elle vous somme de concilier l’existence du mal avec la bonté infinie de Dieu. Hésitez-vous ? elle vous accuse d’impiété.

Fourrier épuise toutes les combinaisons de ce thème.