Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 7.djvu/178

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de celles qui lui restent. Ses taxes agissent comme tout autre obstacle naturel. Le pays F est faible relativement au pays A, comme si sa terre était moins féconde ou sa population moins vigoureuse. C’est un malheur, je le sais, mais un malheur sur lequel le régime restrictif agit comme aggravation, non comme compensation.

L’illusion à cet égard provient de ce que, comparant sans cesse le peuple taxé au peuple non taxé, on reconnaît à celui-ci des éléments de supériorité ; — et qui en doute ? Ce qu’il faut comparer, c’est le peuple taxé à lui-même sous les deux régimes, celui de la restriction et celui de la liberté.

Il y avait, aux environs de Paris, un hospice pour les aveugles. Ils travaillaient les uns pour les autres et ne faisaient des échanges qu’entre eux. Leur pitance était chétive, car ils étaient condamnés à exécuter des travaux bien difficiles et bien longs pour des aveugles. Le directeur de l’établissement leur donna enfin la liberté d’acheter et de vendre au dehors. Leur bien-être s’en augmenta progressivement, non pas jusqu’à égaler celui d’hommes clairvoyants, mais du moins jusqu’à dépasser de beaucoup ce qu’il était du temps de la restriction.

P. S. Le National dit aujourd’hui qu’il n’a pas trop su démêler à qui et à quoi je réponds. Me serais-je mépris sur le sens et la portée de son opposition au libre-échange ? Veut-il, comme nous, que l’entrelacement des intérêts unisse les classes laborieuses de tous les pays de manière à déjouer les calculs pervers ou imprudents de l’aristocratie ? Oh ! Dieu le veuille ! Je serais heureux de reconnaître mon erreur, et de voir avec nous, au moins sous ce rapport, un journal qui s’adresse à des hommes sincères et convaincus.