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36. — LE ROI LIBRE-ÉCHANGISTE[1].


Déclamez donc contre les journaux ! Plaignez-vous de ce qu’ils sont aussi peu intéressants qu’instructifs ! quelle calomnie ! Pour nous, nous y trouvons à chaque instant des choses inattendues, surprenantes, merveilleuses.

Par exemple, l’Impartial de Rouen nous révèle qu’un haut personnage est libre-échangiste. Ce personnage, l’Impartial ne le nomme pas, car il craint la charte et les lois de septembre. Or, dire de quelqu’un qu’il est libre-échangiste, c’est, aux yeux de la feuille Normande, lui faire une mortelle injure.

Nous qui n’avons pas les mêmes raisons d’interpréter ainsi la charte, et qui pensons qu’on peut, sans se déshonorer, préférer, en fait de trocs, la liberté aux entraves, nous ne craignons pas de dire, à nos périls et risques, que le personnage dont il s’agit n’est autre que Louis-Philippe, roi des Français.

Le Roi est donc libre-échangiste. C’est de Rouen qu’en vient la nouvelle. Jusqu’ici rien ne nous l’avait fait soupçonner, et nous devons même confesser, peut-être à notre honte, que nous n’avons pas songé à nous en informer. Quelquefois, il est vrai, quand il a plu au caprice de ces rêves, que l’on nomme châteaux en Espagne, de placer sur notre tête la couronne de France, (car


Au moins quelques instants qui n’est roi dans ses rêves ?)


nous nous rappelions ce vers touchant :


Si j’étais roi, je voudrais être juste.


Et nous nous disions : « Nos sujets disposeraient libre-

  1. Libre-échange du 30 mai 1847. (Note de l’éd.)