Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, X.djvu/21

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II

Nous fîmes connaissance assez singulièrement. Je venais d’achever une étude qui me paraissait crâne, et qui l’était. Elle fut vendue dix mille francs quinze ans plus tard. C’était plus simple d’ailleurs que deux et deux font quatre et en dehors des règles académiques. Tout le côté droit de ma toile représentait une roche, une énorme roche à verrues, couverte de varechs bruns, jaunes et rouges, sur qui le soleil coulait comme de l’huile. La lumière, sans qu’on vît l’astre caché derrière moi, tombait sur la pierre et la dorait de feu. C’était ça. Un premier plan étourdissant de clarté, enflammé, superbe.

À gauche la mer, pas la mer bleue, la mer d’ardoise, mais la mer jade, verdâtre, laiteuse et dure aussi sous le ciel foncé.

J’étais tellement content de mon travail que je dansais en le rapportant à l’auberge.