Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, X.djvu/270

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cinquante-huit ; je peux bien lui demander cela.

Et il sortit.

La maison de Sandres se trouvait de l’autre côté de la rue, presque en face de la sienne. Il s’y rendit. La petite servante vint ouvrir au coup de marteau.

Elle fut étonnée de le voir si tôt :

— Vous déjà, monsieur Saval ; est-il arrivé quelque accident ?

Saval répondit :

— Non, ma fille, mais va dire à ta maîtresse que je voudrais lui parler tout de suite.

— C’est que Madame fait sa provision de confitures de poires pour l’hiver ; et elle est dans son fourneau ; et pas habillée, vous comprenez.

— Oui, mais dis-lui que c’est pour une chose très importante.

La petite bonne s’en alla, et Saval se mit à marcher dans le salon, à grands pas nerveux. Il ne se sentait pas embarrassé cependant. Oh ! il allait lui demander cela comme il lui aurait demandé une recette de cuisine. C’est qu’il avait soixante-deux ans !

La porte s’ouvrit ; elle parut. C’était maintenant une grosse femme large et ronde, aux joues pleines, au rire sonore. Elle marchait les mains loin du corps et les manches rele-