finissaient en Gallicie, les Montriveau succéderaient aux biens et aux titres d’Arschoot ; ils en héritent par leur bisaïeul.
— Vous en êtes sûre ?…
— Je le sais mieux que ne le savait le père de celui-ci, que je voyais beaucoup et à qui je l’ai appris. Quoique chevalier des ordres, il s’en moqua ; c’était un encyclopédiste. Mais son frère en a bien profité dans l’émigration. J’ai ouï dire que ses parents du nord avaient été parfaits pour lui…
— Oui, certes. Le comte de Montriveau est mort à Pétersbourg où je l’ai rencontré, dit le vidame. C’était un gros homme qui avait une incroyable passion pour les huîtres.
— Combien en mangeait-il donc ? dit le duc de Grandlieu.
— Tous les jours dix douzaines.
— Sans être incommodé ?
— Pas le moins du monde.
— Oh ! mais c’est extraordinaire ! Ce goût ne lui a donné ni la pierre, ni la goutte, ni aucune incommodité ?
— Non ; il s’est parfaitement porté, il est mort par accident.
— Par accident ! La nature lui avait dit de manger des huîtres, elles lui étaient probablement nécessaires ; car, jusqu’à un certain point, nos goûts prédominants sont des conditions de notre existence.
— Je suis de votre avis, dit la princesse en souriant.
— Madame, vous entendez toujours malicieusement les choses, dit le marquis.
— Je veux seulement vous faire comprendre que ces choses seraient très mal entendues par une jeune femme, répondit-elle.
Elle s’interrompit pour dire : — Mais ma nièce ! ma nièce !
— Chère tante, dit monsieur de Navarreins ; je ne peux pas encore croire qu’elle soit allée chez monsieur de Montriveau.
— Bah ! fit la princesse.
— Quelle est votre idée, vidame ? demanda le marquis.
— Si la duchesse était naïve, je croirais…
— Mais une femme qui aime devient naïve, mon pauvre vidame. Vous vieillissez donc ?
— Enfin, que faire ? dit le duc.
— Si ma chère nièce est sage, répondit la princesse, elle ira ce soir à la Cour, puisque, par bonheur, nous sommes un lundi, jour de réception ; vous verrez à la bien entourer et à démentir ce bruit ridicule. Il y a mille moyens d’expliquer les choses ; et si le mar-