Page:Œuvres complètes de Juvénal et de Perse, 1861.djvu/236

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jusqu'à des poireaux dont il a compté les filets. Un mendiant, ramassé sur nos ponts, refuserait de s'asseoir à une pareille table. Est-ce un bonheur que d'être riche à ce prix ? N'est-ce pas plutôt une fureur manifeste, une véritable frénésie, que de vivre dans la misère pour mourir opulent ? Tandis que le sac s'enfle et se grossit, la cupidité croît avec l'or qu'on y entasse : moins on possède, moins on désire. - «Une seule métairie ne suffit pas ; tâchons d'en acquérir une autre, et d'étendre mon domaine. Le champ de mon voisin paraît plus vaste et plus fertile : je veux l'acheter avec le petit bois et le coteau blanchi par les oliviers dont il est couvert». - Si le propriétaire ne veut pas vendre, malheur à lui ! notre homme lâchera pendant la nuit, au milieu des épis encore verts, ses boeufs décharnés et le troupeau famélique de ses chevaux harassés ; et ces animaux voraces ne rentreront au logis qu'après avoir tout fait disparaître sous leurs dents, comme si la faux tranchante avait passé dans la moisson. Vous compteriez à peine tous ceux que cette tyrannie contraignit à céder en pleurant l'héritage de leurs pères. - «Mais aussi quels propos ! quelle renommée! -