Page:Œuvres complètes de Maximilien de Robespierre, tome 9.djvu/383

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de la République naissante, à arrêter les progrès de notre révolution dans les contrées voisines, en leur présentant la chute du trône comme l’ouvrage d’une ambition criminelle, & le changement du gouvernement comme un changement de maître.

De là ces éternelles déclamations contre la justice révolutionnaire qui immola les Montmorin, les Lessart[1], & d’autres conspirateurs, au moment où le peuple & les fédérés s’ébranlaient pour repousser les Prussiens. Dès ce moment, ils ne cessèrent de remplir les âmes des députés de défiance, de jalousie, de haine & de terreurs, & de faire entendre dans le sanctuaire de la liberté, les clameurs des plus vils préjugés, & les rugissements des plus furieuses passions. Dès-lors ils ne cessèrent de souffler le feu de la guerre civile, & dans la Convention même, & dans les départemens, soit par leurs journaux, soit par leurs harangues à la tribune, soit par leur correspondance.

Ils étaient venus à bout de reculer par là, pendant quatre mois, le procès du tyran. Quelles chicanes ! quelles entraves ! quelles manœuvres employées durant la discussion de cette affaire ! Qui peut calculer sans frémir les moyens employés par Rolland, les sommes prodiguées par le ministère pour dépraver l’esprit public, pour apitoyer le peuple sur le sort du dernier rois ? Avec quelle lâche cruauté les avocats du tyran appelaient des corps armés contre Paris & contre les députés patriotes, dénoncés par eux comme des assassins & comme des traîtres ! Avec quelle insolent mépris des lois, des corps administratifs, dignes de ces députés, les levaient de leur autorité privée aux dépens du trésor public ! avec quelle perfide audace cette même faction protégeait de toutes parts la rentrée des émigrés, & ce rassemblement de tous les assassins & de tous les scélérats de l’Europe à Paris ! Avec quel odieux machiavélisme on emploie tous les moyens de troubler la tranquillité de cette ville & de commencer la guerre civile, sans même dédaigner celui de faire ordonner, par un décret, la représentation d’une pièce aristocratique ( l’Ami des lois)[2], qui avait déjà fait couler le sang, & que la sagesse des magistrats du peuple avait interdite !

A quoi à tenu le salut de la patrie & la punition du tyran ? [3] au courage invincible des patriotes, à l’énergie calme du peuple, éclairé sur ses véritables intérêts, & sur-tout à la réunion imprévue des fédérés. S’ils avaient conservé les fatales préventions que leur avaient inspirées ceux qui les appelés, si le bandeau était

  1. Les anciens ministres Montmorin et Delessart, périrent dans les massacres de septembre.
  2. Sur les incidents que souleva cette représentation de la pièce de Lava, voir Lettres… à ses commettans, 2e série, n° 4, 211-12.
  3. Sur le procès de Louis XVI et les embûches dressées par les Girondins, voir Lettres… à ses comiinettans, 2e série, n° 4, 225 et s.