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Page:Œuvres complètes de Platon, série 3, tome 1, Dialogues dogmatiques (trad. Dacier et Grou), 1866.djvu/361

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vois que tout le monde est raisonnable aujourd’hui.

Il n’y eut qu’une voix : on résolut d’un commun accord de ne point faire de débauche, et de ne boire que pour son plaisir. — Puisqu’il est convenu, dit Eryximaque, qu’on ne forcera personne, et que chacun boira comme il voudra, je suis d’avis que l’on renvoie premièrement cette joueuse de flûte. Qu’elle aille jouer pour elle, ou, si elle veut, pour les femmes dans l’intérieur. Quant à nous, si vous m’en croyez, nous lierons ensemble quelque conversation. Je vous en proposerai même le sujet, si bon vous semble. — Chacun d’applaudir et de l’engager à entrer en matière. — Éryximaque reprit donc : Je commencerai par ce vers de la Mélanippe d’Euripide : Ce discours n’est pas de moi, mais de Phèdre. Car Phèdre me dit chaque jour, avec une espèce d’indignation : O Éryximaque, n’est-ce pas une chose étrange que, de tant de poëtes qui ont fait des hymnes et des cantiques en l’honneur de la plupart des dieux, aucun n’ait fait l’éloge de l’Amour, qui est pourtant un si grand dieu ? Vois les sophistes habiles : ils composent tous les jours de grands discours en prose à la louange d’Hercule et des autres demi-dieux, témoin le fameux Prodicus ; et cela n’est pas surprenant. J’ai même vu un livre qui portait pour titre : l’Éloge du sel, où le savant auteur exagérait les merveilleuses qualités du sel et les grands services qu’il rend à l’homme. En un mot, tu ne verras presque rien qui n’ait eu son panégyrique. Comment donc peut-il se faire que, dans cette grande ardeur de louer tant de choses, personne, jusqu’à ce jour, n’ait