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Page:Œuvres complètes de Platon (Chambry), tome 1.djvu/26

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la subordination des désirs inférieurs au désir de connaître que consiste la vertu. Une fois arrivé à la connaissance du bien, l’homme est naturellement vertueux ; car on ne peut voir le bien sans le vouloir et le vice vient toujours de l’ignorance. Bien que l’ignorance se réduise à un mauvais calcul, Platon ne la considère pas moins comme un vice punissable. Le méchant, d’après lui, devrait s’offrir de lui-même à l’expiation. S’il y échappe en ce monde, il n’y échappera pas dans l’autre.


L’ESTHÉTIQUE


L’esthétique de Platon dépend aussi de la théorie des Idées et de la morale et de la politique qu’il en a tirées. Les Idées sont immuables et éternelles. Puisque nous devons nous régler sur elles, nos arts seront comme elles immuables et à jamais figés. Et Platon n’admet en effet aucune innovation, ni dans la poésie, ni dans les arts. L’idéal une fois atteint, il faudra s’y tenir ou se recopier sans cesse. L’art n’aura d’ailleurs d’autre liberté que de servir la morale et la politique. « Nous contraindrons les poètes, dit Platon (République, 401 b), à n’offrir dans leurs poèmes que des modèles de bonnes mœurs, et nous contrôlerons de même les autres artistes et les empêcherons d’imiter le vice, l’intempérance, la bassesse, l’indécence, soit dans la peinture des êtres vivants, soit dans tout autre genre d’image, ou s’ils ne peuvent faire autrement, nous leur interdirons de travailler chez nous. » En vertu de ces principes, Platon bannit tous les modes musicaux autres que le dorien et le phrygien, dont la gravité convient à des guerriers. Il bannit la tragédie dont les accents plaintifs pourraient amollir leur cœur ; il bannit la bouffonnerie et même le rire qui sied mal à la dignité qu’ils doivent conserver. Homère même, qu’il aime, qu’il sait par cœur, qu’il cite sans cesse, ne trouve pas grâce à ses yeux, parce qu’il a peint les dieux aussi immoraux que les hommes, et il le renvoie de sa république,