Page:Œuvres complètes de Platon (Chambry), tome 1.djvu/451

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ais tort de te battre, toi qui viens de chanter si faux ce long dithyrambe et qui es resté si loin de la question ? — Comment cela ? répondrai-je. — Tu me demandes comment ! répliquera-t-il. Es-tu donc incapable de te rappeler que c’est sur le beau en soi que portait ma question, sur ce beau qui donne de la beauté à tout objet auquel il s’ajoute, pierre, bois, homme, dieu, action ou science quelles qu’elles soient. C’est cette beauté en soi, l’ami, que je te demandais de définir, et je n’arrive pas plus à me faire entendre que si j’avais affaire à une pierre et encore une pierre de meule, sans oreilles ni cervelle. » Te fâcherais-tu, Hippias, si, pris de peur, je lui disais là-dessus : « Mais c’est Hippias qui a dit que c’était cela, le beau, et cependant je lui demandais à lui, comme tu m’as demandé à moi, ce qui est beau pour tous et toujours. » Qu’en dis-tu ? Tu ne te fâcheras pas si je lui dis cela ?

HIPPIAS

Je suis bien sûr, Socrate, que ce que j’ai dit est beau pour tout le monde et paraîtra tel à tout le monde.

SOCRATE

« Le sera-t-il aussi toujours ? reprendra cet homme ; car c’est en tout temps, n’est-ce pas ? que le beau est beau ? »

HIPPIAS

Assurément

SOCRATE

« L’a-t-il aussi toujours été ? » dira-t-il.

HIPPIAS

Oui, toujours.

SOCRATE

« Est-ce que, poursuivra-t-il, l’étranger d’Élis a dit que pour Achille aussi le beau avait consisté à être enseveli après ses ancêtres, et qu’il en avait été de même pour son grand-père Eaque et pour tous les enfants des dieux et pour les dieux eux-mêmes ? »