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Page:Œuvres complètes de Plutarque - Œuvres morales et œuvres diverses, tome 2, 1870.djvu/317

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DU TEMPLE DE DELPHES.

Dans le mot eithé[1], on dit que la seconde syllabe thé est une adjonction superflue, comme thin dans cet hémistiche de Sophron :

Hama tecnôn thin deuoména
(désirant aussi avoir des enfants),

et dans cet autre d’Homère[2] :

Hôs thin kai son egô lysô menos
(afin que j’anéantisse aussi ta vigueur),

il est reconnu que c’est cette syllabe si courte, ΕΙ, qui, à soi seule et suffisamment, exprime l’idée de désir. »

6. Nicandre ayant terminé, mon camarade Théon, que vous connaissez, cher Sérapion, demanda à Ammonius si la Dialectique se voyant ainsi injuriée outre mesure pouvait, à son tour, parler avec franchise. Ammonius l’engagea à prendre la parole pour elle et à la défendre. Théon alors s’exprima en ces termes : « Apollon est très-expert en dialectique, et le plus grand nombre de ses oracles le prouvent : car c’est au même dieu qui suscite les doutes qu’il appartient de les résoudre. J’ajoute une autre preuve. Comme Platon disait que la réponse du Dieu ordonnant « de doubler l’autel de Délos » (ce qui est une opération de géométrie transcendante), n’a pas pour but de faire accomplir cet ordre, et que c’est seulement une manière d’inviter les Grecs à cultiver la géométrie ; de même le Dieu, en proférant des oracles ambigus, rehausse la dialectique et la constitue, puisqu’il la montre indispensable à ceux qui voudront pénétrer comme il faut le sens de ses paroles. Or dans la dialectique cette conjonction copulative si a une très-grande force, attendu qu’elle sert à formuler une phrase essentiellement logique. Comment ne pas lui reconnaître cette propriété d’unir deux raisonnements ?

« Ainsi, les brutes même ont une perception de l’existence des choses ; mais à l’homme seul la nature accorde, en outre, la faculté de voir et d’apprécier la conséquence qui

  1. Amyot ajoute : « qui signifie à la mienne volonté ».
  2. Iliade, XVII, 29.