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DU TEMPLE DE DELPHES.

voudra les appeler, lesquels varient plus ou moins du grave à l’aigu, suivant que les cordes sont plus ou moins tendues, tandis que les autres sont aiguës. N’est-il pas certain que quoiqu’il y ait entre les sons un grand nombre, ou plutôt une infinité d’intervalles, il n’y en a pourtant que cinq qui entrent dans le chant, à savoir : le dièse, le demi-ton, le ton, le triple demi-ton, et le double ton ? On ne trouve jamais dans le chant d’autres intervalles plus grands ou plus petits[1] qui viennent se placer entre le grave et l’aigu.

11. Laissant de côté plusieurs autres considérations de cette nature, je ferai, continuai-je, intervenir Platon, qui dit qu’il n’y a qu’un seul monde, ou que s’il n’est pas uni que et que d’autres existent avec lui, il y en a cinq en tout, et pas davantage. Mais en supposant que le monde où nous vivons soit l’unique, et c’est ainsi que le pense Aristote[2], il est du moins, lui aussi, composé, en quelque sorte, de cinq mondes qui en forment l’harmonie : l’un est la terre, l’autre l’eau, le troisième le feu, le quatrième l’air, et le cinquième le ciel, ce dernier étant appelé lumière par les uns, éther par les autres, par d’autres enfin quintessence[3]. C’est le seul de tous les corps qui tienne de la nature le mouvement circulaire suivant lequel il se meut, et qui n’obéisse ni à la nécessité ni au hasard. C’est aussi pour cela que Platon[4] ayant remarqué que les cinq formes les plus belles et les plus parfaites dans la nature sont la pyramide, le cube, l’octaèdre, l’icosaèdre et le dodécaèdre, a assigné chacune d’elles à chacun des cinq mondes.

12. Il y a même des philosophes qui rapprochent de ces substances primitives les propriétés des sens, lesquels sont également au nombre de cinq. Ils remarquent, que le toucher offre quelque résistance et tient de la terre ; que le goût perçoit grâce à l’eau les qualités des saveurs ; que l’air au moyen de la percussion, devient pour l’ouïe voix et son. Restent les deux autres sens. Or l’odorat est affecté par les odeurs, et celles-ci sont des exhalaisons que les chaleurs

  1. Amyot ajoute : « distingués de bas et de hault ».
  2. Dans le traité du Ciel, I, 8, 9.
  3. Littéralement : « cinquième essence ».
  4. Dans le Timée.