Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/108

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tout le royaume. Là s’étaient établis et venaient trafiquer an grand nombre d’italiens. Le consul, à la fois pour éprouver les dispositions de l’ennemi, et, si on le laissait faire, pour s’assurer l’avantage d’une place d’armes (45), y mit garnison, et y fit transporter des grains, ainsi que d’autres munitions de guerre. Il jugeait, avec raison, que l’affluence des négociants et l’abondance des denrées dans cette ville seraient d’un grand secours à son armée pour le renouvellement et la conservation de ses approvisionnements. Cependant Jugurtha envoie des ambassadeurs qui redoublent d’instances et de supplications afin d’obtenir la paix : hors sa vie et celle de ses enfants, il abandonnait tout à Metellus. Le consul agit avec ces envoyés comme avec leurs devanciers ; il les séduit, les engage à trahir leur maître, et les renvoie chez eux, sans accorder ni refuser au roi la paix qu’il demandait ; puis, au milieu de ces retards, il attend l’effet de leurs promesses.

XLVIII. Jugurtha, comparant la conduite de Metellus avec ses discours, reconnut qu’on le combattait avec ses propres armes ; car, en lui portant des paroles de paix, on ne lui faisait pas moins la guerre la plus terrible. Une place très importante venait de lui être enlevée ; les ennemis prenaient connaissance du pays et tentaient la fidélité de ses peuples. Il cède donc à la nécessité, et se décide à prendre les armes. En épiant la direction que prend l’ennemi, il conçoit l’espoir de vaincre par l’avantage des lieux. Il rassemble donc le plus qu’il peut de troupes de toutes armes, prend des sentiers détournés, et devance l’armée de Metellus.