Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/141

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pourvu qu’elles soient égales. Les Grecs (94) leur laissent le choix ou d’être enterrés vifs à l’endroit qu’ils prétendaient fixer pour limites de leur pays, ou de laisser avancer leurs adversaires jusqu’où ils voudraient, sous la même condition. Les Philènes acceptent la proposition ; ils font à leur patrie le sacrifice de leurs personnes et de leur vie, et sont enterrés vifs (95). Les Carthaginois élevèrent sur le lieu même des autels aux frères Philènes, et leur décernèrent d’autres honneurs au sein de leur ville. Maintenant je reviens à mon sujet.

LXXX. Jugurtha, après la perte de Thala, voyant que rien ne pouvait résister à Metellus, traverse de vastes déserts, avec un petit nombre d’hommes, et arrive jusque chez les Gétules, nation sauvage et grossière, qui ne connaissait pas encore le nom romain. Il rassemble en corps d’armée cette nombreuse population, l’accoutume insensiblement à garder ses rangs, à suivre les drapeaux, à obéir au commandement, enfin à exécuter les autres manœuvres de la guerre. En outre, pour mettre le roi Bocchus dans ses intérêts, il gagne les ministres de ce prince avec de grands présents et de plus grandes promesses. Aidé de leurs secours, il s’adresse au monarque lui-même, et l’entraîne dans une guerre contre les Romains. Bocchus inclinait d’autant plus facilement vers ce parti, que, dès le commencement de la guerre contre Jugurtha, il avait envoyé des ambassadeurs à Rome pour solliciter notre alliance, et que cette demande, qui venait alors si à propos, fut écartée par les intrigues de quelques hommes qu’aveuglait la cupidité, et qui trafiquaient également de l’honneur et de la honte. Il faut