Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/157

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de Capsa. Là, Marius fait halte avec toutes ses troupes, et se tient caché le mieux qu’il lui est possible. Aussitôt que le jour paraît, les Numides, ne redoutant aucune hostilité, sortent en grand nombre de la ville : à l’instant Marius ordonne à toute sa cavalerie et aux fantassins les plus agiles de se porter au pas de course sur Capsa, et de s’emparer des portes. Lui-même les suit en toute hâte, mais en bon ordre et sans permettre au soldat de piller. Dès que les habitants s’aperçurent du danger, le tumulte, l’excès de la crainte et de l’étonnement, enfin, la perte d’une partie de leurs concitoyens faits prisonniers hors des remparts, tout les oblige à se rendre. Cependant la ville est livrée aux flammes, tous les Numides en âge de porter les armes sont passés au fil de l’épée, le reste est vendu, et le butin partagé aux soldats. Exécution sanglante, contraire au droit de la guerre, et dont on ne doit pourtant accuser ni la cruauté ni l’avarice du consul (120) ; mais cette place, position très avantageuse pour Jugurtha, était pour nous d’un difficile accès, et ses habitants, race mobile, perfide, ne pouvaient être enchaînés ni par la crainte ni par les bienfaits.

XCII. Après avoir accompli, sans perdre un seul homme, une entreprise si importante, Marius, déjà grand et illustre, parut plus grand et plus illustre encore : ses projets les plus hasardés passaient pour l’effort du génie et du courage. Ses soldats, charmés de la douceur de son commandement, et enrichis sous ses drapeaux, l’élevaient jusqu’au ciel ; les Numides le redoutaient comme un être au-dessus de l’humanité ; enfin les alliés, aussi bien que les ennemis, lui attribuant une intelligence di-