Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/346

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soit le degré de leurs lumières, à énoncer les avis qui leur semblent les plus salutaires. Pour ma part, je pense que de la manière dont vous userez de la victoire dépend tout notre avenir.

II. Mais quels seront, pour l’accomplissement de cette tâche, les moyens les meilleurs, les plus faciles ? Je vais, à ce sujet, vous exposer en peu de mots ma pensée. Vous avez, général, eu la guerre contre un homme illustre, puissant, et qui devait plus à la fortune qu’à son habileté : parmi ceux qui l’ont suivi, un petit nombre sont devenus vos ennemis par suite des torts qu’ils s’étaient donnés envers vous (27) ; d’autres ont été entraînés par les liens du sang ou de l’amitié. Car il n’a fait part à personne de sa puissance ; et, en effet, s’il eût pu en souffrir le partage (28), le monde ne serait pas ébranlé par la guerre. Le reste, tourbe vulgaire, par imitation plutôt que par choix (29), a suivi comme le plus sage l’exemple de ceux qui marchaient devant.

Dans le même temps, sur la foi de vos détracteurs, des hommes tout souillés d’opprobre et de débauche, espérant que l’État allait leur être livré, accoururent dans votre camp, et menacèrent ouvertement les citoyens paisibles de la mort, du pillage, enfin de toutes les violences qu’inspirait la corruption de leur âme. Une grande partie d’entre eux, voyant que vous ne réalisiez point de telles espérances, et que vous ne traitiez point les citoyens en ennemis, se séparèrent de vous : il n’en est resté qu’un petit nombre qui ont trouvé dans votre camp plus de tranquillité que dans Rome, tant la foule des créanciers les assiégeait. Mais c’est une chose qui fait frémir que de dire le nombre et l’importance des citoyens qui, par les mêmes motifs,