Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/375

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Il s’embarqua à Rimini, et fit voile vers Cossura, petite île sur la côte d’Afrique ; mais il tomba entre les mains de Pompée, qui venait de soumettre la Sicile. Carbon semblait pouvoir tout espérer de la clémence de ce jeune lieutenant de Sylla, dont il avait protégé la jeunesse. Pompée fut insensible à ses supplications : il fit périr sous ses yeux Carbon, qui, pour gagner un instant de vie,

xxvi.

Feignit d’avoir à satisfaire un besoin naturel,

« Et il fut, dit Valère-Maxime, décapité dans cette posture.»

Cependant Domitius Ahenobarbus, lieutenant de Carbon, s’était retiré en Afrique, où Hiarbas, roi d’une partie de la Numidie, vint le joindre avec toutes ses forces, dont il s’était servi pour dépouiller Hiempsal II, autre prince de la race de Masinissa. Pompée se hâta de passer en Afrique, et débarqua à Curubis, petit port voisin de Carthage. Vainqueur de Domitius, qui fut tué dans l’action, il poursuit Hiarbas, et dissipe sans peine les Africains, qui avaient pris les armes.

xxvii.

Cette guerre avait pour motif la crainte de Pompée vainqueur, et qui voulait rétablir Hiempsal dans son royaume.

Après avoir terminé en quarante jours cette campagne, Pompée, dont la gloire portait ombrage à Sylla, fut rappelé en Italie. Il obéit malgré ses troupes, qui lui offraient leurs bras s’il eût voulu résister à cet ordre. Un ennemi moins digne de lui devait s’élever contre Sylla ; c’était M. Emilius Lepidus, qui déshonorait un nom illustre par ses vices et par sa présomptueuse impéritie. On l’avait vu zélé fauteur du parti populaire, au temps du triomphe de Marius, sous le septième consulat duquel il fut édile curule. Il fut des premiers à passer sous les drapeaux de Sylla vainqueur, et s’enrichit des biens des proscrits. Après avoir exercé la préture, il fut envoyé en Sicile, et, par ses concussions, il mérita d’être traduit en justice à son retour ; mais ses accusateurs, cédant aux instances du peuple, se désistèrent ; et Lepidus, enhardi par l’impunité, osa briguer le consulat. Adulateur servile de Sylla, il en avait espéré la protection ; mais le dictateur, qui avait trop bien jugé ce factieux, lui défendit de se mettre sur les rangs. Alors Lepidus se tourne