Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/512

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enfance, car ce serait peut être accuser ton père, qui dut en prendre soin ; mais j’examinerai comment tu t’es conduit dans ta jeunesse : un pareil examen donnera facilement à entendre combien fut dissolue l’enfance de celui qui, en grandissant, fut si impudique et si effronté. Quand, le honteux revenu que tu retirais du trafic le plus infâme ne put suffire à ton extrême voracité, et que, passant de mode, ton âge ne te permit plus de te livrer à une exécrable prostitution, on te vit, emporté par les mouvements les plus déréglés, essayer sur autrui ce que tu n’avais pas jugé déshonorant sur toi(3). Il n’est point facile, pères conscrits, de décider si de pareilles ignominies ont augmenté ou diminué sa fortune. Son père était vivant encore, quand il eut la bassesse de mettre sa maison en vente ; il la vendit, et l’on ne peut douter qu’il n’ait hâté sa mort, puisque, sans attendre qu’il eût fermé les yeux à la lumière, il disposait de tout en héritier. Et il ne rougit pas de me demander qui habite la maison de P. Crassus, lui qui ne pourrait pas dire qui habite celle de son père ! Mais, s’il a failli, dira-t-on, il faut en accuser l’inexpérience de sa jeunesse ; il s’est sans doute corrigé dans la suite. Nullement, car il se jeta dans la société du sacrilège Nigidius, et, traduit deux fois en justice, il courut le plus grand danger ; toutefois il s’en tira si mal, que ses juges parurent plutôt coupables que lui ne parut innocent. Parvenu au premier degré des honneurs en obtenant la questure, il fut ensuite admis dans le sénat ; mais il ne tarda pas à mépriser une dignité dont pouvait être revêtu l’homme le plus vil, puisqu’elle lui avait