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SALLUSTE.

son talent. Alors il accuse la débilité de son être et s’en prend aux circonstances du mal dont lui seul est l’auteur. Si les humains avaient autant de souci des choses vraiment bonnes que d’ardeur à rechercher celles qui leur sont étrangères, inutiles et même nuisibles, ils ne seraient pas plus maîtrisés par les événements qu’ils ne les maîtriseraient eux-mêmes, et s’élèveraient à ce point de grandeur, que, sujets à la mort, ils devraient à la gloire un nom impérissable.

II. L’homme étant composé d’un corps et d’une âme, tous les objets extérieurs, aussi bien que toutes ses affections, tiennent de la nature de l’un ou de l’autre. Or la beauté, l’opulence, la force physique et tous les autres biens de ce genre passent vite ; mais les œuvres éclatantes du génie sont immortelles comme l’âme. En un mot, les avantages du corps et de la fortune ont une fin, comme ils ont eu un commencement. Tout ce qui a pris naissance doit périr, tout ce qui s’est accru, décliner ; mais l’âme incorruptible, éternelle, souveraine du genre humain, fait tout, maîtrise tout et ne connaît pas de maître. Combien donc est surprenante la dépravation de ceux qui, entièrement livrés aux plaisirs du corps, passent leur vie dans le luxe et dans la mollesse, tandis que leur esprit, la meilleure et la plus noble portion de leur être, ils le laissent honteusement sommeiller dans l’ignorance et dans l’inertie, oubliant qu’il est pour l’âme tant de moyens divers d’arriver à la plus haute illustration !

III. Parmi ces moyens, les magistratures, les commandements, enfin toute participation aux affaires publiques, ne me