Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/79

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romain que sur la fidélité des Numides. Il se borne à envoyer à Jugurtha des ambassadeurs pour se plaindre de ses attaques. Quoiqu’ils n’eussent rapporté qu’une réponse outrageante, Adherbal résolut de tout souffrir plutôt que de recommencer une guerre dont il s’était d’abord si mal trouvé. Cette conduite fut loin de calmer l’ambition de Jugurtha, qui déjà s’était approprié dans sa pensée tout le royaume de son frère. Comme la première fois, ce n’est plus avec une troupe de fourrageurs, mais suivi d’une armée nombreuse qu’il entre en campagne, et qu’il aspire ouvertement à l’entière domination de la Numidie. Partout, sur son passage il répand le ravage dans les villes, dans les campagnes, et emporte un immense butin. Il redouble ainsi la confiance des siens et la terreur des ennemis.

XXI. Placé dans l’alternative d’abandonner son royaume ou de s’armer pour le défendre, Adherbal cède à la nécessité : il lève des troupes et marche à la rencontre de Jugurtha. Les deux armées s’arrêtent non loin de la mer, près de la ville de Cirta ; mais le déclin du jour les empêche d’en venir aux mains. Dès que la nuit fut bien avancée, à la faveur de l’obscurité, qui régnait encore, les soldats de Jugurtha, au signal donné, se jettent sur le camp ennemi. Les Numides d’Adherbal sont mis en fuite et dispersés, les uns à moitié endormis, les autres comme ils prennent leurs armes. Adherbal, avec quelques cavaliers, se réfugie dans Cirta ; et s’il ne s’y fût trouvé une multitude d’Italiens assez considérable pour écarter des murailles les Numides qui le poursuivaient, un seul jour aurait vu commencer et finir la guerre entre les deux rois. Jugurtha in-