Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/80

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vestit donc la ville : tours, mantelets, machines de toutes espèces, rien n’est épargné pour la faire tomber en sa puissance. Il voulait, par la promptitude de ses coups, prévenir le retour des ambassadeurs, qu’il savait avoir été envoyés à Rome par Adherbal avant la bataille. Cependant le sénat, informé de cette guerre, députe en Afrique trois jeunes patriciens chargés de signifier aux deux princes ce décret : « Le sénat et le peuple romain veulent et entendent qu’ils mettent bas les armes, qu’ils terminent leurs différends par les voies de droit, et non par la guerre : ainsi l’exige la dignité de Rome et des deux rois ».

XXII. Les commissaires romains mirent d’autant plus de célérité dans leur voyage, qu’à Rome, au moment de leur départ, on parlait déjà du combat et du siège de Cirta ; mais on ne soupçonnait pas la gravité de l’événement. Au discours de ces envoyés, Jugurtha répondit que rien n’était plus cher et plus sacré pour lui que l’autorité du sénat ; que, dès sa plus tendre jeunesse, il s’était efforcé de mériter l’estime des plus honnêtes gens ; que c’était à ses vertus, et non pas à ses intrigues, qu’il avait dû l’estime du grand Scipion ; que ces mêmes titres, et non le défaut d’enfants, avaient déterminé Micipsa à l’admettre par adoption au partage de sa couronne ; qu’au reste, plus il avait montré d’honneur et de courage dans sa conduite, moins son cœur était disposé à tolérer un affront ; qu’Adherbal avait formé un complot secret contre sa vie ; que pour lui, sur la preuve du crime, il avait voulu le prévenir ; que ce serait, de la part du peuple romain, manquer aux convenances et à la