Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/85

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Rome. Le sénat s’assemble pour en délibérer : on voit encore les mêmes agents de Jugurtha chercher par leurs interruptions, par leur crédit, et même aussi par des querelles, à gagner du temps, à affaiblir l’impression d’un crime si atroce ; et si C. Memmius, tribun désigné, homme énergique, ennemi déclaré de la puissance des nobles, n’eût remontré au peuple que ces menées de quelques factieux n’avaient pour but que de procurer l’impunité à Jugurtha, l’indignation se fût sans doute refroidie dans les lenteurs des délibérations : tant avaient de puissance et l’or du Numide et le crédit de ses partisans. Le sénat, qui a la conscience de ses prévarications, craint d’exaspérer le peuple, et, en vertu de la loi Sempronia (13), il assigne aux consuls de l’année suivante les provinces d’Italie et de Numidie. Ces consuls furent P. Scipion Nasica et L. Bestia Calpurnius. Le premier eut pour département l’Italie ; la Numidie échut au second. On leva ensuite l’armée destinée à passer en Afrique ; on pourvut à sa solde, ainsi qu’aux diverses dépenses de la guerre.

XXVIII. Ce ne fut pas sans surprise que Jugurtha reçut la nouvelle de ces préparatifs ; car il était fortement convaincu que tout se vendait à Rome. Il envoie en ambassade, vers le sénat, son fils et deux de ses plus intimes confidents. Pour instructions, il leur recommande, comme à ceux qu’il avait députés après la mort d’Hiempsal, d’attaquer tout le monde avec de l’or. A leur approche de Rome, le consul Bestia mit en délibération si on leur permettrait d’entrer : le sénat décréta qu’à moins qu’ils ne vinssent remettre et le royaume et la