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Page:Œuvres complètes du Marquis de Sade, tome 13, édition définitive (extrait), 1973.djvu/8

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lâchent la bride à leurs passions, et qu’ils se convainquent bien qu’ils ne servent jamais mieux la nature qu’en multipliant leurs forfaits.

(7)

Ces goûts ne sont vraiment utiles et chers à la nature qu’autant qu’ils propagent, qu’ils étendent ce que les hommes appellent le désordre. Plus ils coupent, sapent, détériorent, détruisent, plus ils lui sont précieux. L’éternel besoin qu’elle a de destruction sert de preuve à cette assertion ; détruisons donc ou empêchons de naître, si nous voulons être utiles à ses plans. Ainsi le masturbateur, le meurtrier, l’infanticide, l’incendiaire, le sodomite, sont des hommes selon ses désirs et ceux que nous devons par conséquent imiter.

(8)

S’imposer des freins ou des barrières dans la route du crime serait visiblement outrager les lois de la nature qui nous livre indistinctement tous les êtres dont elle nous entoure sans jamais motiver d’exception, parce qu’elle méconnaît nos chaînes et nos liens, que toutes ces prétendues destructions sont nulles à ses yeux, que le frère qui couche avec sa sœur ne fait pas plus de mal que l’amant qui couche avec sa maîtresse et que le père qui immole son fils n’outrage pas davantage la nature que le particulier qui assassine un inconnu sur le grand chemin. Aucune de ces différences n’existe à ses yeux : ce qu’elle veut, c’est le crime ; n’importe la main qui le commet ou le sein sur lequel il est commis.