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Page:Œuvres complettes de M. de Marivaux, tome 12, 1781.djvu/34

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appréhender d’être parfaitement libre ? Songez à ce que c’est qu’une liberté, que votre âge, & que l’impunité de l’abus que vous en pouvez faire, rendroient si dangereuse. Si vous n’étiez pas naturessement bon & généreux ; si vous n’aviez pas le meilleur fond du monde, Prince, je ne vous tiendrois pas ce discours-là : mais c’est qu’avec vous il y a bien des ressources ; je vous connoîs, il n’y a que des réflexions à vous faire faire.

THÉODOSE.

À la bonne heure ; mais vous me faites trembler, je commence à craindre très-sérieusement de vous perdre.

THÉOPHILE.

Voilà une crainte qui me charme ; elle part d’un sentiment qui vaut mieux que tous les Gouverneurs du monde : ah ! que je suis content, & qu’elle nous annonce une belle ame !

THÉODOSE.

Il ne tiendra pas à moi que vous ne disiez vrai ; courage, mettons à profit le temps que nous avons à penser ensemble ; nous en reste-t-il beaucoup ?

THÉOPHILE.

Encore quelques mois.