Page:Œuvres de Barthélemy et Méry, tome 3, 1831.djvu/26

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grenadiers français ; le vexillaire et le porte-drapeau ont planté l’aigle romaine et les trois couleurs dans les mêmes corniches, depuis les temples d’Héliopolis jusqu’aux roches granitiques de Philæ, limites des conquêtes de Dioclétien, dernier bivouac de notre armée républicaine ; enfin, notre 7e hussards, le 2 ventose an vii, s’est montré fidèle au rendez-vous de gloire que lui avait assigné la dixième légion du préfet Mutius, aux pieds de la statue de Memnon ; l’orteil du colosse a conservé religieusement l’empreinte des stylets romains et des sabres de nos cavaliers.

Si on ajoute maintenant que l’Égypte est un pays phénomène ; que ses monumens sont comme les débris d’un monde qui n’est pas le nôtre ; que son fleuve animé, son climat d’airain, ses déserts semés de vertes oasis, sont aussi mystérieux que les hiéroglyphes de ses temples ; on conviendra que jamais sujet aussi grand n’offrit ses inspirations à notre poésie nationale. Sans doute bien d’autres avant nous l’avaient reconnu, et ils ont été bien plus rebutés par les obstacles du plan qu’excités par les élémens poétiques du sujet. Dès que la première idée de ce poëme s’offrit à nous, il y a bien des années, elle devint, sans relâche, l’objet de nos entretiens journaliers : Bonaparte s’y révélait avec son auréole de gloire si fraîche et si pure ; l’armée, avec sa majesté antique ; l’Égypte, avec ses souvenirs, ses temples,