Page:Œuvres de Barthélemy et Méry, tome 3, 1831.djvu/87

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Et dans le bataillon ébranlé sous leur poids
Les quarante chevaux retombent à la fois.
Impuissant désespoir ! la ligne de l’armée,
Comme un ressort pliant, sur eux s’est refermée,
Et ce carré de fer, qu’ils viennent d’entrouvrir,
Est l’arène fatale où tous doivent mourir.
On dit que pour venger leur défaite impunie,
Ces guerriers, signalant leur farouche agonie,
Sanglans, percés de coups, sous les chevaux foulés,
Ressuscitaient encor leurs tronçons mutilés ;
Au festin de la mort, effroyables convives,
Ils mordaient nos canons de leurs dents convulsives,
Et rampant sur le sable, un poignard à la main,
Jusqu’aux pieds de Desaix se frayaient un chemin.
Enfin l’ange de mort les touche de son aile ;
Leurs yeux, déjà pressés par la nuit éternelle,
Cherchent en vain Sélim ; ils l’appellent : leurs voix
Murmurent au Désert pour la dernière fois,