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et figure ; et c'est ce qu'on appelle solide en géométrie, où l'on ne considère que les choses abstraites et immaté- rielles. De la sorte que la différence essentielle qui se treuve entre l'espace vuide et le corps matériel, qui a longueur, largeur et profondeur, est que l'un est immo- bile et l'autre mobile, et que l'un peut recevoir au dedans de soy un corps qui pénètre ses dimentions, au lieu que l'autre ne le peut ; car la maxime que la pénétration de dimentions est impossible, s'entend seulement des dimentions de deux corps matériels : autrement elle ne seroit pas universellement receue. D'où l'on peut veoir qu'il y a autant de différence entre le néant et l'espace vuide, que de l'espace vuide au corps ; et qu'ainsy l'es- pace vuide tient le milieu entre la matière et le néant. » Voilà, Monsieur, votre pensée de l'espace vuide fort bien expliquée ; je veux croire que tout cela est évident, et en avez l'esprit convaincu et plainement satisffait, puisque vous l'affirmez, ayant dict auparavant, « qu'on ne doibt jamais porter un jugement desfinitif de l'affirmative ou négative d'une proposition que ce que l'on affirme ou nye n'ayt une de ces deux conditions, sçavoir ou qu'il paroisse si clairement et si invinciblement de luy mesme à la raison ou au sens, suivant qu'il est subject à l'un ou à l'autre, que l'esprit n'ayt aucun moyen de douter de sa certitude ; et c'est ce que nous appelons principes ou axiomes ; ou qu'il se desduise par des conséquences infaillibles et nécessaires de tels principes ou axiomes. » Ce sont, Monsieurs, vos sentiments touchant les condi- tions nécessaires pour assurer une vérité. Et quand je disois à ma lettre ', que tout ce qui [est espace] est corps, je

��1. Man. : que tout ce qui est corps.

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