Page:Œuvres de Blaise Pascal, II.djvu/201

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LETTRE DE PASCAL A M. LE PAILLEUR 18o

et que les degrez qui nous mènent à la connoissance des veritez, sont la définition, l'axiome et la preuve : car d'abord nous concevons l'idée d'une chose ; en suitte nous donnons un nom à cette idée, c'est à dire que nous la définissons ; et enfin nous cherchons si celte* chose est véritable ou fausse. Si nous trouvons qu'elle est impossible, elle passe pour une fausseté ; si nous démontrons qu'elle est vraye, elle passe pour vérité ; et tant qu'on ne peut prouver sa possi- bilité ni son impossibilité, elle passe pour imagina- tion. D'oii il est évident qu'il n'y a point de liaison nécessaire entre la définition d'une chose et l'asseu- rance de son estre ; et que l'on peut aussi bien définir une chose impossible, qu'une véritable. Ainsy on peut appeller un triangle rectihgne et rectangle celuy qu'on s'imagineroit avoir 2 angles droits, et mon- trer ensuite qu'un tel triangle est impossible ; ainsy Euclide définit d'abord les parallèles, et monstre après qu'il y en peut avoir ; et la définition du cer- cle précède le postulat qui en propose la possibilité ; ainsy les astronomes ont donné des noms aux cer- cles concentriques, excentriques et epicicles, qu'ils ont imaginez dans les cieux, sans estre asseurez que les astres décrivent en effet tels cercles par leurs mouvemens ; ainsy les Peripateticiens ont donné un nom à cette sphère de feu, dont il seroit difficile de démontrer la vérité,

C'est pour quoy quand je me suis voulu opposer

��I. Le ms. 12 û88 donne idée, et au-dessus : chose.

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