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Page:Œuvres de Blaise Pascal, II.djvu/293

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LETTRE D ÉTIEN.NE PASCAL AU P. NOËL 277

qualité miraculeuse. Apres cela, mon père, je vous con- jure de nous dire par quel droict vous avez pris la liberté de publier que ces expériences estoient mal recogneiies et encores plus mal avérées, et tascher ainsy à faire passer celuy qui les a produicts pour tout autre chose qu'il n'est très asseurement. Est ce par le droit de votre aage ou de vostre condition, que vous avez pris la liberté d'invectiver ainsy ? Si vous avez creu que ces choses ayent esté assez puissantes pour vous en donner l'authorité, vostre imagi- nation vous a fait malheureusement chopper contre la maxime generalle de la société civile, qui veut qu'il n'y ayt point d'authorité d'aage, point de condition, point de robbe, point de magistrature, point d'érudition, point de vertu qui nous puisse donner la liberté d'invectiver contre qui que ce soit ; et quand mesmes nous avons esté si malheureux que d'avoir esté provoquez par invectives, la mesmeloi ne trouve* pas qu'il soit contre les bonnes mœurs de les repousser contre les autheurs publiquement, si l'in- vective est publique ; mais elle ne nous permet jamais de nous servir d'injures réciproques. Et certainement, quand vous aurez sérieusement examiné [ce]^ que c'est que le stile d'invective, vous trouverez qu'il n'est ny fort, ny persua- dant, ny charitable, ny propre pour acquérir la gloire qu'on se propose pour fin. Et quelle gloire peut un homme d'honneur prettendre de l'art d'invectiver, qui, de soy mesme, n'est rien qu'une pure foiblesse, et tellement naturelle à l'homme, que tant s'en faut qu'il ayt besoing d'estude pour y devenir docte, il luy en faut, au con- traire, beaucoup pour y devenir ignorant; et toutesfois si facile qu'il soit, et quelque appliquation qu'y puisse faire

��I. pas en surcharge.

a. ce omis dans le manuscrit.

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