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ŒUVRES

pese quand elle en est tirée, et ne pese plus quand elle y est renversée ; qu’elle perde son poids en se confondant avec l’autre, et qu’elle le retrouve quand elle en quitte le niveau. Estranges moyens que les hommes cherchent pour couvrir leur ignorance : parce qu’ils n’ont pû comprendre pourquoy on ne sent point le poids de l’eau, et qu’ils n’ont pas voulu l’avoüer, ils ont dit qu’elle n’y pese pas, pour satisfaire leur vanité, par la ruïne de la verité ; et on l’a receu de la sorte : et c’est pourquoy il estoit impossible de croire que la pesanteur de l’Air fut la cause de ces effets, tant qu’on a esté dans cette imagination ; puis que quand mesme on auroit sçeu qu’il est pesant, on auroit toûjours dit qu’il ne pese pas dans luy mesme ; et ainsi on n’auroit pas crû qu’il y produisit aucun effet par son poids.

C’est pourquoy j’ay montré, dans l’Equilibre des Liqueurs, que l’eau pese dans elle mesme autant qu’au dehors, et j’y ay expliqué pourquoy nonobstant ce poids, un seau n’y est pas difficile à hausser, et pourquoi on n’en sent pas le poids : et dans le Traité de la pesanteur de la masse de l’Air, j’ay montré la mesme chose de l’Air, afin d’éclaircir tous les doutes.

La troisiéme erreur est d’une autre nature ; elle n’est plus sur le sujet de l’Air, mais sur celuy des effets mesmes qu’ils attribuoient à l’horreur du vuide, dont ils avoient des pensées bien fausses.

Car ils s’estoient imaginez qu’une Pompe éleve l’eau non seulement à dix ou vingt pieds, ce qui est