Page:Œuvres de Blaise Pascal, III.djvu/68

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S2 ŒUVRES

mis qui me soit arrivée, peust être pour servir de contre- poids à Fextreme joye que j'avois de ma profession. C'est pour quoy je me crois obligée de vous faire participer à la consolation que j'ay receuë. Mais, afin de vous la faire mieux entendre, il me semble nécessaire de vous faire un petit récit fort abrégé de cette hystoire, ce qui servira en mesme temps pour vous en donner l'intelligence et pour satisfaire à l'obligation que j'ay de publier au moins entre nous, puisque je ne puis le faire sçavoir à tout le monde, ce que j'ay reconnu par expérience de la grande charité de nos Mères et de la pureté de leur conduite, qui a tellement paru dans mes affaires qu'il est visible qu'elles ne regardent jamais que Dieu dans toutes sortes d'evenemens.

Ma conscience me presse de rendre ce tesmoignage à la vérité, qui est d'autant plus digne de foy qu'il est plus volontaire, et que mesme je n'ose le rendre public, parce

qui servira en mesme temps pour vous en donner l'esclaircissement et pour satisfaire à l'obligation que j'ay de publier, au moins entre nous, puis qu'il m'est impossible de le porter plus loin, ce que j'ay reconnu par une notable expérience du désintéressement de cette Maison, de la grande charité de nos Mères et de la pureté de leurs intentions et de leur conduite, qui a tellement paru dans mes affaires qu'il ne faut point d'autre preuve pour reconnoistre qu'elles ne regardent jamais que Dieu en toutes les choses où elles sont obligées d'agir.

« Ma conscience me presse, ma très chère mère, de rendre à la vé- rité que je connois ce tesmoignage qui est d'autant plus digne de foy qu'il est tout volontaire, et que mesme je n'ose le rendre public, parce cpie la modestie de notre mère ne pourroit jamais le souffrir et m'empesche d'oser tenter ce que la gratitude et la justice deman- dent de moy, de peur que l'obéissance ne m'interdit ensuite le peu qui m'est encore permis, puisqu'on ne me l'a pas défendu, qui est de vous en laisser un petit mémorial, qui conservera, à la faveur du silence et du secret que nous garderons entre nous, la mémoire de ce qui s'est passé, que nous serions autrement contraintes de laisser périr, et sera le monument de ma reconnoissance, et le fidèle tesmoin du souvenir qui me reste de la grâce cpie j'ay receue, puisque je ne puis rien de plus ».

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